9 millions de personnes en France chaque jour accompagnent un proche en perte d’autonomie, une personne âgée ou handicapée pour l’aider à faire sa toilette, se déplacer, s’alimenter, être présent. Ce sont les « Aidants familiaux » ils aident leur proche à raison de 5 heures en moyenne par jour et cela gratuitement (Une contribution sociale qui pourrait représenter 164 milliards s’ils devaient être remplacés).
Comment devient-on aidant familial ?
Sans forcément le vouloir, ou du moins le savoir. Si certains décident d’eux-mêmes d’assumer ce noble rôle gratifiant, d’autres à l’inverse se retrouvent pris dans cet engrenage de manière insidieuse. Confrontés à un proche qui perd peu à peu son autonomie, ils finissent par s’en occuper tous les jours un peu plus sans se rendre compte de la charge qui pèse sur eux. Leur vie familiale, professionnelle ou même sociale en est alors impactée sans qu’ils en aient réellement conscience. Et lorsqu’ils comprennent la situation dans laquelle ils se sont enfermés, ils sont alors en grande souffrance.
L’impact sur leur santé est considéré comme un nouveau problème de santé publique car les conséquences de leur rôle génèrent le plus souvent un stress croissant, des troubles du sommeil, un épuisement, un schéma dépressif important qui conduisent vers une dégradation de leur santé.
Une grande majorité des Aidants que nous accompagnons présentent des signes de dépression sévères.
« L’aidant d’un proche privilégie systématiquement la santé de la personne qu’il accompagne au détriment de la sienne et néglige ses besoins de santé primaire ».
Il n’est pas rare que certains décèdent avant la personne qu’il accompagne.
Ah oui tout de même ! Pourquoi ne parle-t-on pas plus d’eux ?
Une des caractéristiques des Aidants est leur invisibilité sociale. Pourtant ils forment un groupe émergeant majeur mais relativement discret ils assument leur rôle qui souvent les isolent socialement. Progressivement ils sombrent dans une forme d’autisme qui les empêche la plupart du temps de s’ouvrir vers l’extérieur et de bénéficier des solutions d’aides ou d’accompagnement existantes. Le manque de temps est généralement évoqué.
Savez-vous que près de la moitié d’entre eux doivent souvent concilier en plus de leur rôle d’Aidant une activité professionnelle ? Nous les appelons les « Salariés-Aidants »
Et comment font-ils ?
Concilier une double vie professionnelle et rôle d’Aidant est extrêmement difficile. L’impact sur leur santé est redoutable, l’organisation quotidienne compliquée. (14% des salariés en France sont concernés par l’accompagnement d’un proche).
Si les conséquences pour l’Aidant sont particulièrement difficiles (Stress, sommeil, santé) pour l’entreprise et la société en générale elles le sont tout autant car l’absentéisme des Aidants dû à leur vie compliquée représente jusqu’à 16 jours d’absence par année pour un quart d’entre eux.
Que leur est-il proposé ?
La plupart des cadres dirigeants ne connaissent pas le phénomène et n’ont pour la grande majorité aucune idée de l’impact sanitaire et social sur leur personnel ni les conséquences économiques sur leur entreprise (1% du PIB est considéré comme cohérent).
Nous avons mis en place des solutions de « Care Management » en direction des cadres dirigeants et des Salariés Aidants afin de sensibiliser l’entreprise pour quelle prenne en compte les conséquences d’une population qui vieillit et mieux accompagner ses salariés confrontés à la dépendance d’un proche.
Mais ça pourrait être moi ? Je ne saurai jamais faire.
Oui nous tous sommes concernés. Tous, un jour ou l’autre nous devrons accompagner un proche handicapé ou âgée fragilisé perdant une partie de son autonomie.
La majorité assume leur rôle sans y être préparé. La plupart par manque d’information de formation s’épuisent au quotidien devant la complexité de la tâche, un stress croissant, un manque de connaissance entraine parfois un risque de maltraitance inconscient.
Rendez vous compte, grâce aux solutions proposées dans le cadre du maintien à domicile une personne âgée en perte d’autonomie peut bénéficier d’environ 3 ou 4 heures par jour d’accompagnement par un professionnel en principe qualifié, 3 ou 4 heures sur 24 que compte une journée, soit 20 heures par jour pendant lesquelles l’Aidant familial doit assumer seul ce qui parfois est du ressort du rôle d’un professionnel ( soins techniques par exemple) et cela sans avoir reçu aucune formation, il assume son rôle 365 jours sur 365 !
Concilier vie sociale, vie familiale, vie professionnelle, rôle d’Aidant est un exercice périlleux et beaucoup doivent réduire ou stopper une partie de ces vies. En général, c’est d’abord la vie sociale puis familiale et enfin la vie professionnelle qui sont impactées (absentéisme, présentéisme, aménagement d’horaires et parfois démission). Contribution à un phénomène qui n’est pas assez évoqué « La paupérisation des Aidants de proche »
Quelles précautions prendre alors ?
Qu’il s’agisse d’un choix personnel ou d’une situation imposée, « il faut accepter d’être aider pour mieux aider l’autre ». Beaucoup de particuliers amenés à s’occuper d’un de leur proche handicapé, malade ou dépendant pensent qu’ils vont tenir le coup sous prétexte que « c’est leur devoir ». Cette notion de culpabilité gangrène leur vie. Et, au motif que la personne aidée est de leur famille, ils ne se fixent pas de limite de temps, de compétences ou encore d’énergie. Or, depuis quand vouloir faire le mieux possible constitue-t-il un gage de qualité de vie pour l’Aidé et pour l’Aidant ?
S’occuper et accompagner une personne en perte d’autonomie n’est pas inné et nécessite un apprentissage, de même pour le rôle d’aidant il en va de la santé du couple Aidant-Aidé, nous parlons ici de mieux accompagner une personne âgée en perte d’autonomie ou pénalisée par un handicap.
Quelles sont les solutions existantes ?
Il faudrait arriver à ce que les Aidants d’un proche puissent accepter d’être accompagnés, de pouvoir bénéficier gratuitement d’un niveau d’informations préventives leur permettant de mesurer les risques de ne pas s’imposer de limites à leur rôle, de comprendre la nécessité de conserver une vie sociale, de prendre du recul, de déléguer, de connaitre les différents types de congés légaux, les différentes solutions d’aides, d’arrêter de culpabiliser de ne pas pouvoir ou savoir faire plus ou mieux…
Des formations existent aujourd’hui pour apprendre aux particuliers à assumer leur rôle d’aidant sans perdre leur propre identité (www.cif-aidants.com). Etre l’Aidant d’un proche demande des compétences particulières tant sur le plan technique que psychologique. Il faut donc prendre le temps d’acquérir les bons gestes, des savoir-être et des savoir-faire et ainsi comprendre l’importance de se dégager des moments pour soi, l’idéal serait de se préparer en amont.
Que demande La Maison des Aidants® ?
Nous rencontrons régulièrement des Aidants de proches qui nous disent qu’ils aimeraient :
– Une reconnaissance sociale. Une reconnaissance de tous les Aidants familiaux (Pas seulement ceux concernés par la maladie d’Alzheimer qui représentent seulement 10 à 15 % de l’ensemble des Aidants).Une reconnaissance de leurs compétences, de leur travail, de leur contribution à la société en permettant le maintien à domicile de leur proche, les Aidants représentent l’interface incontournable du maintien à domicile sans eux le choix politique qui consiste à maintenir le plus longtemps possible chez elle une personne en perte d’autonomie ne serait pas envisageable. Ils sont devenus la plus grande entreprise de santé de France ! Qu’on se le dise !
– Une reconnaissance par et dans la société
– Une reconnaissance par et dans l’entreprise
– Une reconnaissance qui leur donnerait des droits.
– Des droits à l’information formation.
– Des droits dans le monde du travail
– Des droits pour une meilleure santé
Et alors concernant La journée nationale des Aidants ?
En 2010 a été initié « la Journée Nationale des Aidants », La Maison des Aidants® a été sollicitée très tôt afin de travailler avec les partenaires sur les différentes tables rondes qui ont ponctué cette journée mémorable du 6 Octobre 2010 pas moins de quatre ministres étaient présents avec pour chacun un discours qui laissait supposer une pérennité très forte pour les années suivantes.
Puis ont suivi les JNA de 2011 et 2012 assez discrètes et sans grand relais gouvernementaux. Nous attendons donc celle de 2013 avec espérance…Si certaines initiatives s’essoufflent cette journée a le mérite de rappeler à tous, que les Aidants familiaux ne sont pas les autres mais nous tous un jour ou l’autre.
Et vous La Maison des Aidants® qu’allez vous faire ?
La Journée nationale des Aidants nous la passerons à Bordeaux, à la demande d’un groupe de protection sociale national, pour une rencontre avec un groupe d’Aidants que nous allons accompagner sur plusieurs mois.
Plusieurs mois ?
Bien sûr, pour eux et pour nous la journée des Aidants c’est toute l’année !!
Pascal JANNOT : président fondateur de La Maison des Aidants® et directeur du CIF-Aidants
Pour en savoir plus : www.lamaisondesaidants.com